Shane est assis dans son fauteuil roulant, au milieu d’une allée de supermarché remplie de marchandises.
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Shane et Hannah

Cesser de s’excuser

Bien des gens vivant avec l’AS se reconnaîtront dans ma description d’un schème de pensée précis, que j’ai surnommé le « complexe du fardeau ». C’est une notion sur laquelle j’ai beaucoup écrit, mais je crois qu’elle est si courante chez les gens vivant avec l’AS qu’il vaut la peine d’en parler une fois de plus.

« Pour moi, le ‘complexe du fardeau’ était simple : quand j’étais jeune, de l’âge de dix à vingt-cinq ans environ, demander de l’aide aux autres faisait parfois naître chez moi un immense sentiment de culpabilité. »

J’avais l’impression de déranger les autres. Je ressentais la nécessité de réduire mes besoins afin de représenter une charge moins lourde pour mes proches. Ce sentiment n’était pas constant, mais certainement difficile à gérer. Ces émotions difficiles me poussaient à toujours formuler la même phrase au moment de demander de l’aide : « Je m’excuse, mais... »

« Je m’excuse, mais est-ce que je pourrais avoir une autre gorgée de mon verre? »

« Je m’excuse, mais peux-tu m’aider à aller aux toilettes? »

On réagissait souvent de la même façon à ces excuses. Mes proches ou mes amis me disaient : « Tu n’as pas besoin de t’excuser; je suis ravi de t’aider! » Or, ces mots rassurants ne parvenaient pas à atténuer mon impression d’être un fardeau.

C’est seulement au moment de rencontrer ma fiancée, Hannah (et de tomber éperdument amoureux d’elle) que j’ai enfin été capable de cesser de m’excuser. En me posant une question en apparence toute simple, Hannah m’a aidé à mieux comprendre mon complexe du fardeau, et donc à m’en défaire.

Voici à peu près comment s’est déroulée la conversation.

« Hé, Hannah, je suis désolé, mais pourrais-tu m’apporter une collation? »

« Bien sûr mon Shane, que je trouve charmant et intelligent et drôle, mais tu n’as pas besoin de t’excuser. Tu sais que j’adore t’aider. »

« D’accord, mais est-ce que tu me dis ça parce que le contraire serait méchant? » (C’était typique; mon complexe du fardeau me poussait à nier les paroles rassurantes des autres.)

« Ça te plaît d’être mon copain? »

« Quoi? Oui, évidemment. »

« Et si tu disais ça juste pour être gentil? »

« Bien sûr que non! Je t’aime! »

« Tu vois ce que ça fait? Quand on remet en question quelque chose que tu dis avec toute la sincérité du monde? »

« Et, subitement, j’ai compris. Je ne mentirais jamais à Hannah au sujet de mes sentiments pour elle; pourquoi alors remettre en question ses paroles rassurantes quant à mon complexe du fardeau? »

Bien sûr, je simplifie ici un processus de guérison qui prend du temps. Même aujourd’hui, je me surprends par moment à penser à moi comme étant un fardeau. Mais en cessant volontairement de m’excuser pour chacune de mes demandes et en me rappelant que ceux qui m’aiment n’auraient aucune raison de me mentir au sujet de leur désir de m’aider, j’ai fait de gros progrès en parvenant à nous percevoir, mes besoins et moi, de manière plus saine.