Karli assise dans un fauteuil roulant, habillée d’une robe de soirée bleue. Un homme lui embrasse la joue.
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Karli

Tout le monde a droit à l’intimité

L’absence d’accessibilité m’a toujours été familière. Comme j’ai grandi avec l’AS, je m’attendais à rencontrer des barrières à l’accessibilité partout où j’allais. Enfant, je refusais aussi de les laisser me ralentir; je m’adaptais donc chaque fois que c’était possible.

On connaît tous les formes d’absence d’accessibilité les plus communes : escaliers sans rampes d’accès, ascenseurs trop étroits, tables trop hautes. Vous voyez le portrait. Il existe toutefois un type d’absence d’accessibilité plus pernicieux, auquel on ne pense pas souvent : les disparités en matière d’éducation à la sexualité.

Mais reprenons depuis le début...

L’intégration des personnes handicapées dans les écoles était un concept relativement récent quand j’étais jeune, ce qui ne remonte pas à si longtemps. Mais comme on peut s’y attendre, les progrès sont assez lents à se produire. Et selon ce que je sais, l’accessibilité pour les étudiants demeure insuffisante à ce jour.

Je n’ai pas tout de suite compris que l’éducation de mes pairs comportait tout un chapitre de plus que la mienne. Ç’a été une révélation graduelle, à coups d’indices subtils, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de doute possible.

L’éducation sexuelle se faisait souvent dans les cours d’éducation physique, auquel je ne participais jamais. Je me suis dit qu’il s’agissait d’une coïncidence, et non d’une exclusion délibérée. J’ai donc entrepris de suivre mes propres cours sur le sujet. Par moi-même et pour moi-même. Je me rappelle très bien avoir feuilleté des manuels de santé pour découvrir « comment on fait les bébés », indépendamment de ce qu’on m’apprenait en classe.

C’est seulement plus tard que j’ai commencé à m’investir dans la communauté des personnes handicapées. Et ma foi, j’ai appris que l’exclusion des discussions sur l’intimité était un énorme problème, propre aux personnes vivant avec une invalidité. Dans le monde entier. Et pas seulement à l’école, mais dans toutes sortes de contextes.

Bien sûr, il existe une foule de stéréotypes qui sous-entendent que les personnes handicapées n’ont ni l’envie ni les capacités d’entretenir des relations intimes, quelles qu’elles soient. Ces fausses croyances sont non seulement néfastes pour notre communauté, mais également dangereuses. Elles sont à la source de tout ce qui nous exclut du discours sur l’intimité et les relations.

Et je refuse d’accepter cet état de fait; c’est pourquoi j’en ai fait une mission personnelle d’aller plus loin dans l’exploration de ma santé sexuelle et reproductive.

Mon objectif? Commencer à rectifier le tir à l’intérieur de la communauté des personnes handicapées.

J’ai commencé de façon toute simple, en parlant de manière ouverte et naturelle de mes aventures amoureuses (les bonnes, les mauvaises et les horribles) avec mes amis handicapés.

J’offrais des conseils et je partageais mon expérience à quiconque m’en faisait la demande. J’en profitais aussi pour trouver des ressources, que je transmettais à ceux qui cherchaient des renseignements sur une question précise.

Actuellement, quelques amis et moi consacrons beaucoup de notre temps libre à ménager des espaces sécuritaires en ligne pour les personnes invalides – dont une bonne part vit avec l’AS – afin de produire collectivement une banque de conseils et d’observations en matière d’intimité. Le soutien entre pairs s’est toujours avéré un atout inestimable, notamment pour moi-même.

J’espère qu’un jour, des espaces comme ceux-là serviront de complément à l’éducation sexuelle offerte dans les écoles, au lieu d’en être la source unique. Après tout, chacun a droit à un accès égal et adéquat à cette part essentielle de l’éducation à la santé.